Sentiment d’appartenance et développement des territoires

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Fiche Ressources DLD N°920-2048

Sentiment d’appartenance et développement des territoires

« Il ne faut jamais confondre la ville avec le discours qui la décrit. Et pourtant, entre la ville et le discours, il y a un rapport » Italo Calvino, Les villes invisibles.


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Introduction

Le sentiment d’appartenance est aujourd’hui au coeur des démarches de développement territorial. « Développer le sentiment d’appartenance » devient un leitmotiv. L’Homme libre a pourtant toujours beaucoup de difficultés à imaginer qu’il appartient à quelque chose. Dans le cadre de la République Française, on nous a longtemps expliqué qu’il existait une seule communauté : « celle des citoyens » ; la « carte nationale d’identité » faisant foi. La mondialisation de l’économie, l’émergence de l’Europe, la montée des localismes rendent-elles cette appartenance factice ou dépassée ? La Nation n’est-elle plus le cadre le mieux adapté pour « vivre ensemble ». En existe-t-il d’autres, à d’autres échelles comme celle des « pays » ? Ces différents niveaux d’appartenance s’emboitent-ils ? Faut-il les développer ou les construire ?

Réfléchir au sentiment d’appartenance revient à poser plusieurs questions :

  • A quel espace, à quel territoire j’appartiens ? D’où je viens ?
  • Qu’est-ce qui fait ce sentiment d’appartenance ?

La réponse à la première question est relative et dépend beaucoup de l’endroit d’où l’on parle. Aux Etats-Unis, je répondrais que je viens d’Europe voire de France. Dans une autre région de France, je dirais que je viens d’Alsace. En Alsace, je dirais que je viens de Strasbourg. Pour provoquer, je dis souvent que j’arrive de Lorraine. En Lorraine, je suis du « Pays-Haut ». A Strasbourg, je réponds que j’habite le quartier de l’hôpital. En clair, mon « pays c’est la ville » , pour parodier le slogan de l’Association des maires des grandes villes de France. Dans mon travail quotidien de « développeur », j’interviens plus souvent en milieu rural que dans les quartiers des grandes villes. La question est la même pour les personnes que je rencontre. Quel est le pays d’un commerçant de la Petite-Pierre au Nord-Ouest du Bas-Rhin. A quel territoire appartient-il ? Sa commune, la Communauté de Communes du Pays de la Petite-Pierre, le Parc Naturel des Vosges du Nord, l’Association de Promotion Economique de la Région de Saverne ? Difficile à dire.

Elle nous renvoie à la seconde question : qu’est-ce qui fait ce sentiment d’appartenance ?

On peut citer quelques éléments en vrac : le lieu où j’ai été élevé, celui où j’habite, mon histoire et celle de ma famille, là où habitent mes proches, mes amis, mon lieu de travail, ma pratique de l’espace, mes habitudes, mes repères, des couleurs, des odeurs, des goûts, des lumières, des paysages, des actes symboliques comme celui de voter…

Difficile d’expliquer comment s’élabore ce sentiment d’appartenance. On peut supposer qu’interviennent différents éléments parmi lesquels : la pratique directe de l’espace, la perception directe de l’environnement à travers les sens et la perception indirecte notamment à travers les médias.

Les psychologues et les géographes ont montré que nous nous déplaçons, nous nous orientons comme si nous avions en nous une représentation de l’espace. Choisissant dans l’espace ce que son expérience antérieure lui a fait connaître directement, et dans celui, généralement plus vaste qu’il a reçu des autres ou des média, l’individu ordonne tout ce qu’il connaît sur des configurations mentales qui lui permettent de se repérer en fonction de stratégies. Ce processus de cognition est un va-et-vient permanent entre l’individu et son environnement. Le sentiment d’appartenance participe de la même logique. Il n’est pas figé et varie dans l’espace et dans le temps en fonction des caractéristiques de l’individu et de l’environnement.

S’interroger sur le sentiment d’appartenance revient à questionner les nouveaux rapports de l’Homme à l’espace et au temps. Comment « habiter le temps » ?

I. Des difficultés et un besoin

Des obstacles

Il peut paraître paradoxal de parler de sentiment d’appartenance tant notre environnement social et matériel semblent aujourd’hui perturbé :

  • Pas de sentiment d’appartenance unique

Entre son quartier, son village et le monde, l’individu fonctionne en appartenances multiples. Le sentiment d’appartenance ne se suffit pas de la seule dimension spatiale. Les sociologues nous expliquent que l’homme de cette fin de XXe siècle redécouvre la tribu. En clair il appartient à des groupes divers : familles, amis, collègues, partenaires sportifs… qui fonctionnent plus souvent en réseau que dans la proximité.

  • L’accroissement de la mobilité a fait sauter les cadres classiques du quotidien

On n’a jamais autant parlé du territoire et notre espace de vie n’a jamais été aussi tiraillé, voire aliéné. Les cadres classiques de la quotidienneté et de la citoyenneté ont éclaté. La spécialisation des espaces en zones de logement, d’achats, de loisirs, de formation ou de travail nous oblige à bouger, à nous déplacer de plus en plus loin. En moyenne, le français parcourt environ 20 km pour se rendre à son travail. Je me souviens que pour ma grand-mère, les gens du village voisin étaient encore des étrangers.

  • La pratique de l’espace est de plus en plus discontinue

Il zappe les espaces, passant de l’un à l’autre par des tunnels, des « non-lieux » qu’il n’investit pas affectivement. La cartographie de notre espace vécu ressemble plus à un archipel aux limites floues relié par des réseaux qu’à un bassin de vie idéal ou à un quartier d’une ville. « Vivre, c’est passer d’un espace à un autre, en essayant le plus possible de ne pas se cogner » avertissait Georges Perec.

Comment retrouver un ancrage, une appartenance alors que nous menons aujourd’hui plusieurs vies en plusieurs espaces ? Cette mobilité accrue, ce nomadisme subi peuvent avoir des effets pervers : une majorité de personnes ne votent plus là où elles vivent mais là où elles dorment. Il est à craindre que nos fameux « bassins de vie » ne soient bientôt plus que de simples « bassins de nuit ».

  • L’urbanisation a fait sauter les repères

L’urbanisation, le développement des infrastructures, l’intensification de l’agriculture ont modifié et uniformisé notre environnement faisant sauter les repères. Qu’est-ce qui ressemble plus à une entrée de ville, qu’une autre entrée de ville ? Si le paysage est le reflet de notre société : au secours ! Une plaine transformée en steppe maïsicole, des fonds de vallées envahis par les épicéas, des entrées d’agglomération qui ressemblent à des stands de fête foraine, des zones industrielles et commerciales qui mitent le paysage, des lotissements sans âme, des grands ensembles qui concentrent les problèmes, des coeurs de village qui se vident, des rocades, des traversées de villages uniformes, et les ronds-points qui rivalisent de laideur. On se balade de plus en plus dans des « espèces d’espaces » où tout finit par se ressembler.

  • Les identités ne sont pas figées

Une identité évolue dans le temps, en fonction des caractéristiques de chacun. L’identité et la mémoire sont vivantes. Il est difficile, voire dangereux, de penser pouvoir les figer une fois pour toutes.

  • Tous les acteurs d’un territoire n’ont pas la même identité

Il est difficile de réunir tous les acteurs d’un même territoire sous une même identité. Quelle relation existe-t-il, par exemple, entre des individus qui s’inscrivent à des échelles aussi différentes qu’un industriel, un commerçant, un agriculteur, un résident, un élu ou un étranger ? Quelle relation établir entre la personne bloquée sur un territoire repaire et celle qui passe son temps en déplacement pour qui le territoire est un repère ?

Une préoccupation

Le sentiment d’appartenance est une question fondamentale dans la réflexion des territoires. Trois exemples recueillis dans le département du Bas-Rhin mettent en évidence cette préoccupation :

  • La « Charte intercommunale de développement du canton de Bischwiller » consacre un long développement à « une identité locale floue et dévalorisée ».
  • La « Convention de développement et d’aménagement du Piémont des Vosges » en cours de réflexion insiste également sur ces aspects :
    • « Un territoire doit être identifié ; il doit faire entendre sa voix, alors que les territoires périphériques s’organisent activement »
    • Il faut « concrétiser une politique d’environnement et d’image : signalisation en matière touristique, culturelle, économique - valorisation des productions locales »
    • Il faut « préserver l’identité du Piémont : sentiers de découverte du milieu naturel - recenser les milieux naturels sensibles - créer des itinéraires de randonnée (pédestre, cycliste, vtt…) »
  • Une des premières réalisations de la « Charte de développement de l’économie et de l’emploi en Alsace du Nord » (1996) a consisté à rédiger un Livre Blanc du territoire.
  • On retrouve le sentiment d’appartenance dans le choix des noms des structures intercommunales le plus souvent empruntés aux entités culturelles, humaines ou agricoles : Communauté de communes des villages du Kelbach, Communauté de communes de l’Espace Rhénan, Communauté de communes du Delta de la Sauer, Communauté de communes de la Porte du vignoble, Communauté de communes des coteaux de la Mossig, Communauté de communes du Val de Villé, Communauté de communes de la Haute Vallée de la Bruche.
  • Même les entreprises -locales ou internationales- s’impliquent fortement dans le territoire à travers leurs organisations : Groupement des industriels de la vallée de la Bruche, Association des chefs d’entreprises de la région de Saverne (…). Les démarches de labellisation ou de produits de terroir vont dans le même sens.

II. Quelques pistes

Difficile mais pas impossible. De nombreuses stratégies sont mises en place pour développer le sentiment d’appartenance :

  • Produire de la connaissance sur le territoire

Il s’agit tout d’abord de faire prendre conscience aux décideurs de la réalité socio-économique de leur territoire. Cette prise de conscience passe par l’établissement de diagnostics socio-économiques prenant en compte la dimension prospective et la réalisation de diagnostics environnementaux, paysagers et patrimoniaux. L’approche historique est trop souvent évacuée alors qu’elle est essentielle pour un travail de mémoire.

  • Diffuser et faire partager cette information

Il s’agit ensuite de socialiser cette connaissance afin de démarrer la démarche sur la base d’un diagnostic partagé. Cette information doit se faire en interne vers les élus, la population et les entreprises -qui sont encore trop peu associées-. Elle peut également se faire en direction des acteurs extérieurs censés intervenir sur le territoire. On existe aussi par rapport aux autres ou autrement dit : « le moi se pose en s’opposant au non-moi ».

  • Définir un projet commun à tous

A partir du diagnostic partagé peut se mettre en place un projet de territoire. En mobilisant l’ensemble des énergies en même temps ce projet doit permettre de faire « système » en donnant un but à l’ensemble des acteurs. La définition de ce projet demande un travail d’animation conséquent et l’émergence d’une culture de l’action. La formule des groupes de travail thématiques animés par des consultants extérieurs est généralement retenue.

  • Mettre en place des outils

A l’expérience, et quelques soient les territoires et les échelles, on retrouve un certain nombre d’outils communs. Il y a tout un travail autour de l’image de la structure et du territoire. La démarche passe nécessairement par le choix d’un nom et d’un logo. Il s’agit ensuite de communiquer à travers un bulletin destiné aux habitants, une plaquette qui vante les qualités du pays, un tableau de bord, un document de synthèse type « chiffres-clés ». La réalisation d’une carte thématique du territoire -le plus souvent touristique- est un formidable outil d’appropriation. En fixant des contours, le projet prend forme et l’espace devient territoire.

Les pistes de travail concernent également des actions sur le paysage : maintien des vergers traditionnels, réouverture des fonds de vallées. La mise en place d’une signalétique particulière est souvent souhaitée. Des actions précises concernant la sauvegarde du patrimoine ou l’architecture sont envisagées. Des parcours de découvertes (voiture, cheval, vélo, pédestre…) sont mis en place. Les routes thématiques se multiplient : route de la bière, route de la choucroute, route de la carpe frite, route romane (…). Des actions de valorisation des produits locaux en circuits courts ou de labellisation de produits du terroir sont mises en place. La restauration de monuments phares, symboliques, et leur mise en lumière sont intéressantes : château, ancien chevalet de mine(…). Les fêtes et les spectacles qui sont mis en place par les associations participent également du renforcement de ce sentiment d’appartenance.

On peut citer dans le Bas-Rhin la réalisation du spectacle « Rêve d’une nuit d’été », spectacle son et lumière qui mobilise tous les habitants du Val de Villé. L’animation de la démarche de développement est essentielle. Le sentiment d’appartenance se manifeste parfois à travers les personnages tels que l’élu où l’agent de développement en charge des projets. Leur énergie, leur charisme et leur foi peuvent « faire territoire ». Ce sont eux qui vont tisser les liens entre acteurs. Le sentiment d’appartenance passe également par les jeunes et les enfants laissés trop souvent à l’écart de ces démarches. Il faut réfléchir à la mise en place d’une véritable « éducation à l’environnement et au territoire », l’organisation d’ateliers de connaissance du territoire et de ses acteurs, savant mélange d’éducation civique et de « leçons de choses ».

L’échelle des « pays »

Pour mener toutes ces actions, l’échelle du pays, telle qu’elle est définie dans la loi, n’est pas toujours la mieux appropriée.

  • Moyens

Jusqu’ici, les moyens mis à disposition sont insuffisants voire inexistants pour pouvoir mettre en place des démarches d’animation et de développement à cette échelle. En Alsace par exemple, des moyens conséquents ont été dégagés au niveau des bassins de vie et des structures intercommunales (programmes de développement, embauches d’agents…) mais peu au niveau des bassins d’aménagement et d’emploi.

  • Taille, échelle et logique économique

Les démarches menées jusqu’ici ont permis de travailler sur le sentiment d’appartenance en s’appuyant sur de petites entités paysagères, géographiques ou humaines typées : vallées, vieille industrie… Le pays évoqué dans la loi dépasse ces limites et comprend des entités plus larges. Les bassins d’aménagement ou d’emploi concernés fonctionnent plutôt sur des logiques économiques moins lisibles dans le paysage.

  • Absence de « porteur symbolique »

Le pays n’est pas un échelon électoral et ne peut donc pas s’appuyer sur l’existence d’un porteur politique symbolique. Le projet n’est pas tout. Il a souvent besoin de s’incarner. Sans représentation effective, il semble difficile d’envisager une participation, un débat ou un engagement réel des citoyens.

  • Absence de temps

Là où le pays ne s’inscrit pas dans le « temps long » cher à Fernand Braudel, il faudra beaucoup de patience pour espérer développer un sentiment d’appartenance.

Il serait illusoire de penser pouvoir y arriver sans disposer de moyens conséquents pour l’animation ou la réalisation de projets symboliques ou structurants.

III. Des risques

L’identité, les représentations ou la mémoire collective sont des domaines délicats, sujets à manipulations, qu’il faut aborder avec la plus grande prudence.

  • Décalage entre la réalité et l’image construite

Certains territoires souffrent parfois d’un décalage entre une image passéiste et la réalité. Il existe par exemple des tensions entre l’Alsace folklorique des « cinq C » (cathédrale, colombage, coiffe, cigogne et choucroute) et la réalité d’une région plurielle fortement industrialisée et ouverte sur l’international.

  • Construction d’une identité ghetto et récupération

La surenchère folklorique peut susciter des mécanismes de fermeture, de repli ou de rejet de l’autre. On a vu certains partis politiques extrémistes s’appuyer sur des images folkloriques. Attention au mythe de l’âge d’or qui nous saisit dès qu’un repère disparaît. Les sidérurgistes qui ont la larme à l’oeil en voyant s’effondrer leurs haut-fourneaux ne doivent pas oublier les conditions de travail d’alors pour ne retenir que le « bon vieux temps ». Je me souviens encore de leurs colères et de leurs griefs. Jetons un regard lucide sur le passé et entamons un véritable travail de mémoire en cherchant à demeurer objectifs. Sinon, d’autres sauront profiter de cette nostalgie passagère. Elle leur sert à typer, séparer, identifier afin de mieux faire ressortir des différences tant ethniques que religieuses entre ceux du dedans et ceux du dehors. Ils s’appuient sur ces symboles pour « faire tribu » et stigmatiser l’Autre, plus facilement exclu. L’affiche du parti d’extrême droite alsacien représentant une alsacienne à coiffe traditionnelle portant le voile islamique est un modèle du genre. Le sociologue Jean VIARD rappelait récemment que le Front National s’était servi du symbole de la lavande dans sa campagne électorale à Vitrolles. En écho, cette phrase d’un militant FN : « La culture ce n’est pas NTM, notre culture c’est La fille du puisatier » . Quelque soit l’échelle, méfions-nous des techniques qui, sous couvert de mobilisation, consistent à exalter l’identité réelle ou fictive d’une communauté pour mieux dévaloriser l’image de l’autre en la déligitimant.

  • Surenchère

Attention à ne pas tomber dans l’omphalomanie . Méfions-nous du pathos et de l’emphase : le Monde ne s’articule pas toujours autour du clocher de notre village, toutes les sous-préfectures ne sont pas au coeur de l’Europe et le croisement de deux départementales ne constitue pas toujours un carrefour international. A l’heure où le moindre territoire passe du « savoir-faire au faire-savoir » , le marketing territorial a ses limites et ses échelles. A force de mettre en avant ses qualités et de crier au monde qu’on est la plus belle, on s’expose en retour au jugement du miroir. A trop vouloir folkloriser son passé, le présent vous éclate parfois à la figure. C’est le cas à Strasbourg où des « journalistes pyromanes » titrent« guerre urbaine » à la moindre voiture incendiée.

  • Invention d’une identité déconnectée de la réalité économique

Le paysage est un construit social. Il évolue au rythme des changements de notre société. Vouloir le protéger c’est bien. Le faire évoluer harmonieusement : c’est mieux. L’ensemble du territoire ne peut être transformé en musée à coups de subventions et de classements. Il faut chercher à articuler le paysage avec l’économie. A quoi sert de protéger artificiellement les vergers qui entourent nos villages si personne n’est capable d’assurer un débouché pour les fruits. A quoi sert de remettre en herbe des pâturages en fonds de vallée pour satisfaire les touristes si l’on ne réussit pas à y installer de jeunes éleveurs.

  • Risque de conflit

Des conflits d’usage peuvent naître entre une pratique traditionnelle d’un espace et une « consommation esthétisante ». C’est ce qui se passe parfois dans certaines églises où les croyants sont gênés par des norias de touristes.

  • Eclatement symbolique, logotisation de l’espace

A force de vouloir restaurer ou instaurer une identité, chaque territoire se transforme peu à peu en duché avec son blason. N’y a-t-il pas un risque à multiplier les communautés entre le citoyen et la Nation ?

  • Caricature et kitsch

On peut fabriquer de « l’authentique » à la manière du « fada » de Jean de Florette mais point trop n’en faut. La surenchère identitaire peut faire sombrer un territoire dans un kitsch et un mauvais goût qui desserviront à terme le pays et susciteront le rejet de la population et des visiteurs.

  • Espace imposé

Il faut veiller à ne pas fabriquer un espace caricatural, avec trop de cheminements imposés, devenant des obstacles à la découverte et à l’errance, un frein à l’appréhension des réalités du territoire ?

Conclusions

  • Deux remarques :

On admettra que le sentiment d’appartenance est une notion à manipuler avec précaution qui doit demeurer évolutive afin d’éviter les pièges de l’identité ghetto. On constatera que sur le terrain, c’est souvent l’étranger - « celui qui n’est pas du pays »- qui le construit et s’investit le plus -au moins symboliquement-.

  • Une question pour de nouvelles frontières :

Alors que les nouvelles technologies de communication bouleversent nos repères, on peut s’interroger sur le sentiment d’appartenance dans les « territoires virtuels » décrits par Dominique Hummel .

  • Une invitation

Au-delà de ces quelques réflexions, il parait nécessaire d’engager une réflexion approfondie sur les processus de mobilisation en cours sur les territoires, l’appel à l’identité et au réflexe communautaire. « Développer le sentiment d’appartenance » : peut-être. Mais pour qui et pour quoi faire ? La notion d’identité rime trop souvent avec légitimité, revendication et pouvoir politique pour que l’on fasse l’impasse sur de nouvelles investigations ? Difficile de multiplier les « cartes d’identité » sans préalable !

  • Une sucrerie :

Je ne peux résister à l’envie de vous communiquer la devise d’un petit pays du Haut-Doubs entre Morteaux et Pontarlier, le Saugeais : « Le Saugeais n’a pas de frontières : ce sont ses voisins qui sont bornés ».


Communication au Colloque « Le pays, espace pertinent de synergies territoriales », Commissariat général au Plan, Futuroscope de Poitiers, 27, 28 mars 1997



le 27 mars 1997 par Luc Gwiazdzinski
modifie le 27 avril 2011

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  • J’aurais cru tomber sur un article à propos du permis de conduire ou autre sujet sur le transport. Cependant, je trouve ce sujet sur le sentiment d’appartenance et la relation avec les territoires intriguant. Il est vrai que notre sens d’appartenance est relatif. Je ne pourrais dire d’où vient ce besoin de connaître ses racines ni le besoin de se sentir « chez soi » dans un certain endroit mais ne dit-on pas « pour aller de l’avant, il faut savoir aussi d’où l’on vient » (Fernand Braudel)…